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Documentation PostgreSQL 16.6 » Programmation serveur » Système de règles » Règles et droits

41.5. Règles et droits #

À cause de la réécriture des requêtes par le système de règles de PostgreSQL, d'autres tables/vues que celles utilisées dans la requête originale pourraient être accédées. Lorsque des règles de mise à jour sont utilisées, ceci peut inclure des droits d'écriture sur les tables.

Les règles de réécriture n'ont pas de propriétaire séparé. Le propriétaire d'une relation (table ou vue) est automatiquement le propriétaire des règles de réécriture qui lui sont définies. Le système de règles de PostgreSQL modifie le comportement du système de contrôle d'accès par défaut. Avec l'exception des règles SELECT associées aux vues en mode security invoker (voir CREATE VIEW), toutes les relations utilisées pour la vérification des règles sont vérifiées de nouveau avec les droits du propriétaire de la règle, et non pas avec ceux de l'utilisateur ayant appelé la règle. Ceci signifie que, sauf pour les vues en mode security invoker, les utilisateurs ont seulement besoin des droits pour les tables/vues qui sont explicitement nommées dans leur requêtes.

Par exemple : un utilisateur a une liste de numéros de téléphone dont certains sont privés, les autres étant d'intérêt pour l'assistant du bureau. Il peut construire de cette façon :

CREATE TABLE phone_data (person text, phone text, private boolean);
CREATE VIEW phone_number AS
    SELECT person, CASE WHEN NOT private THEN phone END AS phone
    FROM phone_data;
GRANT SELECT ON phone_number TO assistant;
   

Personne en dehors de cet utilisateur (et les superutilisateurs de la base de données) ne peut accéder à la table phone_data. mais, à cause du grant, l'assistant peut lancer un select sur la vue phone_number. le système de règles réécrira le select sur phone_number en un select sur phone_data. Comme l'utilisateur est le propriétaire de phone_number et du coup le propriétaire de la règle, le droit de lecture de phone_data est maintenant vérifié avec ses propres privilèges et la requête est autorisée. La vérification de l'accès à phone_number est aussi réalisée mais ceci est fait avec l'utilisateur appelant, donc personne sauf l'utilisateur et l'assistant ne peut l'utiliser.

Les droits sont vérifiés règle par règle. Donc, l'assistant est actuellement le seul à pouvoir voir les numéros de téléphone publiques. Mais l'assistant peut configurer une autre vue et autoriser l'accès au public. Du coup, tout le monde peut voir les données de phone_number via la vue de l'assistant. Ce que l'assistant ne peut pas faire est de créer une vue qui accède directement à phone_data (en fait, il le peut mais cela ne fonctionnera pas car tous les accès seront refusés lors de la vérification des droits). Dès que l'utilisateur s'en rendra compte, du fait que l'assistant a ouvert la vue phone_number à tout le monde, il peut révoquer son accès. Immédiatement, tous les accès de la vue de l'assistant échoueront.

Il pourrait être dit que cette vérification règle par règle est une brèche de sécurité mais ce n'est pas le cas. Si cela ne fonctionne pas de cette façon, l'assistant pourrait copier une table avec les mêmes colonnes que phone_number et y copier les données une fois par jour. Du coup, ce sont ces propres données et il peut accorder l'accès à tout le monde si il le souhaite. Une commande grant signifie « j'ai confiance en vous ». Si quelqu'un en qui vous avez confiance se comporte ainsi, il est temps d'y réfléchir et d'utiliser revoke.

Notez que, bien que les vues puissent être utilisées pour cacher le contenu de certaines colonnes en utilisant la technique montrée ci-dessus, elles ne peuvent pas être utilisées de manière fiable pour cacher des données dans des lignes invisibles sauf si le drapeau security_barrier a été initialisé. Par exemple, la vue suivante n'est pas sécurisée :

CREATE VIEW phone_number AS
    SELECT person, phone FROM phone_data WHERE phone NOT LIKE '412%';
   

Cette vue peut sembler sécurisée car le système de règles va réécrire tout SELECT à partir de phone_number dans un SELECT à partir de phone_data et ajouter la qualification permettant de filter les enregistrements dont la colonne phone ne commence pas par 412. Mais si l'utilisateur peut créer ses propres fonctions, il n'est pas difficile de convaincre le planificateur d'exécuter la fonction définie par l'utilisateur avant l'expression NOT LIKE.

CREATE FUNCTION tricky(text, text) RETURNS bool AS $$
BEGIN
    RAISE NOTICE '% => %', $1, $2;
    RETURN true;
END
$$ LANGUAGE plpgsql COST 0.0000000000000000000001;

SELECT * FROM phone_number WHERE tricky(person, phone);

Chaque personne et chaque numéro de téléphone de la table phone_data sera affiché dans un NOTICE car le planificateur choisira d'exécuter la procédure tricky avant le NOT LIKE car elle est moins coûteuse. Même si l'utilisateur ne peut pas définir des nouvelles fonctions, les fonctions internes peuvent être utilisées pour des attaques similaires. (Par exemple, la plupart des fonctions de conversions affichent les valeurs en entrée dans le message d'erreur qu'elles fournissent.)

Des considérations similaires s'appliquent aussi aux règles de mise à jour. Dans les exemples de la section précédente, le propriétaire des tables de la base de données d'exemple pourrait accorder les droits select, insert, update et delete sur la vue lacet à quelqu'un d'autre mais seulement select sur lacet_log. l'action de la règle pourrait écrire des entrées de trace qui seraient toujours exécutées avec succès et que l'autre utilisateur pourrait voir. Mais il ne peut pas créer d'entrées fausses, pas plus qu'il ne peut manipuler ou supprimer celles qui existent. Dans ce cas, il n'existe pas de possibilité de subvertir les règles en convaincant le planificateur de modifier l'ordre des opérations car la seule règle qui fait référence à shoelace_log est un INSERT non qualifié. Ceci pourrait ne plus être vrai dans les scénarios complexes.

Lorsqu'il est nécessaire qu'une vue fournisse une sécurité au niveau des lignes, l'attribut security_barrier doit être appliqué à la vue. Ceci empêche des fonctions et des opérateurs choisis spécialement de voir des valeurs de lignes jusqu'à ce que la vue ait fait son travail. Par exemple, si la vue montrée ci-dessus a été créée ainsi, elle serait sécurisée :

CREATE VIEW phone_number WITH (security_barrier) AS
    SELECT person, phone FROM phone_data WHERE phone NOT LIKE '412%';
   

Les vues créées avec l'attribut security_barrier peuvent avoir de bien pires performances que les vues créées sans cette option. En général, il n'y a pas de moyen de l'éviter : le plan le plus rapide doit être éviter si cela compromet la sécurité. Pour cette raison, cette option n'est pas activée par défaut.

Le planificateur de requêtes a plus de flexibilité lorsqu'il s'occupe de fonctions qui n'ont pas d'effets de bord. Ces fonctions sont qualifiées de LEAKPROOF et incluent de nombreux opérateurs simples fréquemment utilisés, comme les opérateurs d'égalité. Le planificateur de requêtes peut en tout sécurité permettre à de telles fonctions d'être évaluées à tout moment dans l'exécution de la requête car les appeler sur des lignes invisibles à l'utilisateur ne pourra pas faire transpirer ces informations sur les lignes invisibles. De plus, les fonctions qui ne prennent pas d'arguments ou à qui aucun argument n'est passé à partir de la vue disposant de l'option security_barrier n'ont pas besoin d'être marquées LEAKPROOF pour être exécutées avant car elles ne reçoivent jamais des données de la vue. En contraste complet, une fonction qui peut envoyer des erreurs dépendant des valeurs reçues en argument (comme les fonctions qui renvoient une erreur dans le cas d'un dépassement de capacité ou de division par zéro) ne sont pas LEAKPROOF, et risquent de fournir des informations sur les lignes invisibles si elles sont exécutées avant que la vue ne les filtre.

Il est important de comprendre que, même une vue créée avec l'option security_barrier est supposée être sécurisée dans le sens où le contenu de lignes invisibles ne sera pas passé à des fonctions supposées non sécurisées. L'utilisateur pourrait bien avoir d'autres moyens pour accéder aux données non vues ; par exemple, ils peuvent voir le plan d'exécution en utilisant EXPLAIN ou mesurer la durée d'exécution de requêtes sur la vue. Un attaquant pourrait être capable de deviner certaines informations comme la quantité de données invisibles, voire obtenir des informations sur la distribution des données ou les valeurs les plus communes (ces informations affectent la durée d'exécution de la requête ; ou même, comme elles font partie des statistiques de l'optimiseur, du choix du plan). Si ces types d'attaques vous posent problème, il est alors déconseillé de donner l'accès aux données.